Église de Doue (3)

Huile : 65 x 54

C’était l’heure de la sieste, j’étalais le corps, j’encoussinais la tête pour la rêvasserie et les torpeurs suaves.
J’avais remarqué la toile tissée à l’angle de la fenêtre qui suivait dans un étirement de gymnaste son ouverture, mais ce jour-là, j’y voyais une petite mouche engluée qui se débattait et, surgissant, l’araignée.
Dame Nature est cruelle. Je décidais courageusement d’intervenir. J’optais pour le magazine Nos Amis les Bêtes plus consistant replié que le journal local.
Je ne l’ai pas ratée l’affamée, j’ai gagné le pompon, l’araignée et la mouche sont écrabouillées dans la même purée et mon carreau est tout daubé.
Je me suis rencoussiné et rassoupi. Le papier peint du salon s’est alors mis à frissonner, à faire des vagues. Il se décolle sous la poussée et se déroule de haut en bas libérant des milliers d’araignées guerrières et revanchardes. Les tiroirs sont poussés il en sort des velues, le buffet s’ouvre il en vient des ventrues, de la télé, de sous les plinthes, de sous tous les dessous elles arrivent, elles envahissent, elles m’envahissent pour tisser sur mon corps une toile phénoménale.
J’axphixie, je paralyse. Des commerciaux de la bande, spécialistes de la rigolade décident d’investir mes orifices. C’est d’un délicat ! La PDG, l’écrasée ressuscitée requinquée, repart avec mon œil droit que ses consœurs ont extirpé, elle s’installe sur mon Home Cinéma pour le déguster avec ma confiture de figues rapportée de Corse. Je suis sucé, aspiré, grignoté, dévoré … réveillé.
Il fallait me secouer, j’enfilourchais des fringues adaptées et puis mon VTT.
Je pédalais tranquillement.
Il était gracieux ce bel insecte qui m’était inconnu. Entre papillon et libellule, ailes dentelées, couleurs guillerettes, il voletait primesautier. Le temps de l’observer, un moineau venu du fossé l’avait becqueté, Dame Nature est cruelle. Je continuais, déterminé à ne plus me mêler des problèmes animaliers.
Je pédalais vivement.
Ces vaches regroupées à mon passage me regardaient drôlement. Je vérifiais qu’il n’en sortait pas de partout, on m’avait déjà fait le coup.
Je pédalais nerveusement.
Le roitelet, il se fait rare, gazouillait un peu plus loin sur un piquet. J’espérais bien m’en approcher pour l’écouter mais une buse venue du ciel vint sous mes yeux le frapper pour l’emporter. Dame Nature est cruelle. Je n’avais pas bougé.
Je pédalais craintivement.
Tout prêt maintenant une église, charmante avec son petit cimetière allongé à ses côtés, un coin sûr, je pourrais y souffler, m’y réfugier. Les alentours paraissent calmes, pas de grands fauves en chasse. Peut-être quelques taupinières et puis ce vol de corbeaux semble-t-il pourchassé par une soutane déployée. Dame Nature est cruelle. Je quitte la petite église, j’ai cru entendre rugir au loin.
Je pédalais anxieusement. J’ai mon carreau à nettoyer.