La butte de Doue en blé

Huile : 92 x 73

La singularité, la protubérance, la belle qui dépasse, la douce bosse ; les sillons des labours alentour s’y rejoignaient pour y former une vague inattendue.
On la voyait de loin la croupe briarde. Elle s’arrondissait mollement vers son église pour la rassurer des courants d’air.
On approchait, on arrivait. Comme si ça ne suffisait pas à être toujours plat tout à coup ça pouvait monter. Si le mollet ne souffrait pas c’est que la pente était comme arrangée pour promeneurs n’aimant pas la douleur.
Une ruelle discrète venait à nous en harmonie de quelques vieilles maisons aux rudes meulières et aux tuiles ocre, vertes et grisonnantes.
La sente bordée de ronciers lui succédait. Elle n’avait rien de particulier cette sente, elle suivait son petit bonhomme de chemin. D’abord terreuse dans sa longueur, puis empierrée, elle avait été sournoisement goudronnée à sa moitié. Là, il y avait début de trahison sur le patrimoine. Clignons des yeux, fermons paupières, on grimpera à l’odeur, les boutons d’or nous guideront, on fera comme si c’était avant. Avant quand les herbes étaient plus hautes, les lapins plus nombreux, les coquelicots aveuglants. Avant quand les meuglements s’élevaient du Taillis, quand les gamins revenaient de Mauroy des grenouilles dans les poches, quand le vent d’Est faisait voler les odeurs de pommes de Mélarchez.
Moins de grillons, moins de sauterelles, moins de papillons, la bête se fait rare. Maintenant la brocante s’installe avec toupet presqu’en bas, les blés dégringolent vers Ste Catherine, les cerfs-volants distraient du pique-nique et la visite de l’église est programmée.
Un bouton d’or à la boutonnière on va redescendre, on va se rétaler dans la plaine, prendre du recul et la mater de loin la grosse qui dépasse.
D’ailleurs elle dépasse sûrement de moins en moins.